Depuis que j’ai découvert Silent Hill 2 en Août, cette série m’obsède. Par son ambiance, son esthétique, ses concepts, ses moments absolument cultes, son exploration horrifique de la psyché dérangée de personnages torturés… et plus globalement l’incroyable créativité qui s’en dégage.
Si Silent Hill 2 est considéré comme le chef d’œuvre des jeux de la Team Silent, parfait de A à Z en ce qui concerne son histoire, compliment plutôt valable aussi pour son gameplay remis dans son contexte de sortie (en dehors de boss absolument ridicules)… les autres jeux sont plus ou moins décriés et sujets à débat. Je n’ai pas touché au premier, qui me rebute trop (je pense que son gameplay est daté tout pile au delà du seuil du tolérable pour moi). Mais au sortir de Silent Hill 2, que j’ai en effet absolument adoré, j’étais pressé de me lancer dans la découverte des deux prochains jeux. Deux jeux sur lesquels je suis renseigné depuis des années (notamment de par les excellentes vidéos de Plouf et Pseudo sur la série), qui m’intéressent de part leur concept, et dans lesquels j’avais pour objectif de me lancer et pouvoir sortir une phrase du genre « Putain ils sont sous-côtés de ouf en vrai, ils sont tout aussi brillants que le second ! ».


Pour Silent Hill 3, comme j’ai pu en parler dans ma réflexion disponible ici, ça ne s’est pas passé comme prévu… Le jeu souffre d’une grosse crise existentielle, ne sachant pas s’il doit se contenter d’être une bête suite au premier avec des thématiques tournant autour de la secte religieuse ennuyante de la série, ou s’il doit prendre une direction plus psychologique comme instaurée dans Silent Hill 2. Si il y a bien des symbolismes brillants, des scènes cultes et une thématique en toile de fond passionnément malsaine, le jeu reste étouffé par ses liens avec le premier opus, l’empêchant de développer à fond son propos, et surtout par un gameplay absolument infâme ayant créé en moi un rejet viscéral pour ce jeu.
Mais pour Silent Hill 4, l’expérience a été toute autre… Puisqu’elle a été concluante. Pour dire les choses directement, Silent Hill 4 m’a mis une claque monumentale. Je suis tombé amoureux de ce jeu dès les premières minutes, j’ai vécu une relation assez compliquée et toxique à plusieurs moments pendant son cours… et j’en suis ressorti passionnément amoureux, sentiment exalté par ces montagnes russes hors du commun. La passion est si forte que je ne pourrais pas me contenter de simples réflexions comme pour Silent Hill 2 et 3. J’ai besoin de parler longuement de ce jeu monumental pour sortir tout ce que j’ai sur le coeur.

Silent Hill 4 a divisé quand il est sorti, énormément. Son blason a largement été redoré depuis, le jeu a été analysé en long et en large et entièrement réhabilité, désormais considéré par beaucoup comme un jeu culte, et comme le second meilleur Silent Hill. Mon propos lors de cette analyse n’aura donc rien de révolutionnaire, car c’est un avis que je partage aussi. Mais j’ai juste trop sur le cœur. Alors, plongeons ensemble dans ce jeu à l’aura si unique, merveilleux chant du cygne de la Team Silent.
La chambre d’à côté
Car en effet, Silent Hill 4 : The Room est le dernier jeu développé par l’équipe originale de Silent Hill avant que la dénommée Team Silent ne soit dissoute par un Konami débile qui, comme d’habitude, ne se rend pas compte de l’or qu’il a entre les mains.
Le développement de Silent Hill 4 est très documenté : développé à la base comme un jeu indépendant (d’où son sous-titre « The Room »), puis rattaché à la série après coup, le tout en parallèle de Silent Hill 3 avec une équipe plus réduite…
Mais ce développement singulier est ce qui, selon moi, a permis autant de libertés créatives et d’idées fortes au jeu, tandis que le reste de la Team Silent était contrainte de développer une suite à Silent Hill 1, car le très osé Silent Hill 2 avait déçu à sa sortie. Comme quoi, les temps changent en même temps que les mentalités.
Voici les figures majeures de l’équipe :



Il est maintenant temps de voir ce qu’ils nous ont cook. Petite précision : je n’ai pas pris de captures pendant ma découverte du jeu, je ne pensais pas en faire un article. J’utiliserais donc des captures d’écran provenant de walkthrough trouvables sur Internet, en particulier celui-ci.
Laissez-moi sortir !
Le synopsis de Silent Hill 4 est d’une simplicité déconcertante. Mais une simplicité morbide, profondément perturbante, et surtout incroyablement accrocheuse.
On incarne un protagoniste duquel on a pas grand chose à faire, de part son caractère terriblement banal : Henry Townshend, jeune photographe en fin de vingtaine, vivant dans un petit appartement dénué de personnalité dans la petite ville de South Ashfield Heights : la chambre 302.
Depuis 5 jours, Henry fait toujours le même rêve : son appartement est délabré, hanté par des créatures terrifiantes, et rempli d’objets qui ne lui appartiennent pas. Alors que, comme depuis 5 jours, il se réveille de son cauchemar récurrent, il découvre qu’il est enfermé chez lui. Enfermé oui, mais de l’intérieur. Avec des énormes chaînes placées sur sa porte, ainsi que le message « Ne sors pas !! – Walter » inscrit dessus. Il peut voir le monde extérieur : à travers sa fenêtre, le judas de sa porte, l’étrange trou creusé par le précédent propriétaire donnant sur la chambre de sa voisine… mais le monde extérieur ne le voit pas. Personne ne l’entend crier, personne ne le voit. Les fenêtres sont profondément fermés, et aucun moyen d’ouvrir cette porte.



Absolument aucune échappatoire, jusqu’à ce qu’il découvre un énorme trou béant dans sa salle de bain, qui, l’empruntant de manière terriblement désintéressé, l’emmènera dans différents endroits au cours du jeu : étranges, déconnectés de la réalité, remplis de créatures monstrueuses… Bref, des niveaux de Silent Hill. L’on découvrira petit à petit que tous ces évènements étranges sont liés à une terrible affaire de meurtres en série perpétrée par un psychopathe aux desseins absolument terrifiants du nom de Walter Sullivan.
Wow. Je trouve ce concept initial absolument MONUMENTAL. J’ai rarement vu un truc aussi accrocheur. C’est perturbant, terriblement mystérieux et intrigant. Le caractère mystérieux de ce scénario est ce qui va véritablement donner toute sa substance au jeu, et qui m’a fait tenir jusqu’au bout malgré certaines lourdeurs dans le gameplay. Parce que je voulais savoir ! Savoir pourquoi Henry est enfermé, qu’est-ce que c’est que ce trou, quel est le lien avec Walter Sullivan, que faisait l’ancien propriétaire de l’appartement…
Le concept initial n’est pas la seule chose réussie du scénario. En effet, tout le reste de la narration de Silent Hill 4 est excellente, et ça ne viendra aucunement perdre en intensité au cours du jeu. C’est même tout le contraire.
Comme dans Silent Hill 2, c’est un scénario qui, moins on en sait, mieux il sera et plus forte en sera l’expérience. De manière un peu moindre certes, car il n’y a ici pas d’énorme twist qui vient te mettre une claque ultime. Tout est ici plus graduel, éparpillé, plutôt construit comme une sorte d’enquête en fait. La narration passe en effet beaucoup par les notes, principalement passées en dessous de la porte de la chambre de l’appartement de manière inexplicable, dans lesquelles le précédent propriétaire de la chambre 302 fait part de l’avancée de son enquête sur Walter Sullivan. C’est aussi beaucoup de narration environnementale, notamment dans la chambre qui évolue sans cesse ou encore dans les niveaux qui ont tous un lien avec notre tueur en série.


Ainsi on se posera toujours des questions au sein du jeu, on viendra constamment essayer de raccrocher tous les indices et faire nos théories sur ce qui s’est passé… jusqu’à ce que la fin vienne en partie répondre à tout ça, en prenant bien le soin de laisser plus de zones d’ombres qu’à l’accoutumée dans la série, de manière à nous faire notre propre interprétation de ce bordel. De faire notre propre travail d’enquêteur. C’est d’ailleurs pour ça qu’Henry est si banal et détaché des évènements : il est fait pour qu’on s’identifie à lui.

Parlons un peu des personnages. Première constatation : ils sont bien plus nombreux que d’habitude ! Si dans les trois précédents jeux le nombre de personnages se comptaient sur les doigts d’une main, ici on en a une petite dizaine. Pas de spoil ici mais c’est entièrement dû à la structure narrative du jeu, mettant en scène des personnages de manière brève pour les faire disparaître très peu de temps après leur apparition. Ces personnages « secondaires » cochent toutes les cases de Silent Hill : des charadesigns réussis, et une manière de se mouvoir et de parler qui entre totalement dans la vallée de l’étrange.
Les personnages véritablement importants et présents du début à la fin se résument véritablement à Henry, Eileen (sa voisine de palier ayant un rôle majeur), et surtout, le véritable personnage principal du jeu : Walter Sullivan.
Bon sang quelle réussite ! C’est la première fois que l’antagoniste est le personnage central d’un jeu Silent Hill, et bon sang que c’est bien fait ! Son design est merveilleux : son regard vide, son sourire maléfique, son accoutrement et sa stature imposante, sa présence pesante… Walter Sullivan est ABSOLUMENT TERRIFIANT. Son histoire est passionnante, tragique, malsaine au possible, et va me permettre de parler d’un des aspects les plus réussis du jeu… son placement dans la mythologie Silent Hill.



Concrètement, Silent Hill 4 réussit à faire ce que Silent Hill 3 n’a pas réussi : c’est à dire s’inclure dans la chronologie de la série sans se laisser étouffer par cette dernière (en particulier par les évènements de Silent Hill premier du nom et ce foutu Ordre) et en développant sa propre identité ! L’histoire du jeu est intimement liée à l’Ordre (en particulier sur les origines de Walter), mais ça n’est qu’une idée posée en toile de fond pour donner un contexte, permettant de laisser briller les concepts absolument merveilleux du jeu. C’est aussi un jeu qui embrasse totalement l’héritage de Silent Hill 2 (ayant d’ailleurs des liens subtils mais importants et directs avec ce dernier), sans pour autant en être une copie conforme. En résumé : il prend des éléments de Silent Hill et de Silent Hill 2, fait sa tambouille avec… pour raconter quelque chose d’absolument inédit et jamais senti comme une redite. Et qu’est-ce que ca fait plaisir !
Ce scénario malsain, mystérieux et cohérent est donc LE gros point fort du jeu. Il y a d’ailleurs de vraies analyses à en tirer, notamment sur l’isolement des japonais, la dépression, l’endoctrinement, et encore et toujours la maternité. Un scénario qui sera magnifié par le design du jeu, sur lequel il est temps de revenir.
Home Sweet Home
La structure de Silent Hill 4 est ce qui fait principalement l’originalité du jeu. En effet, le jeu s’ouvre en première personne, alors que l’on découvre l’appartement. Que l’on découvre son agencement, toutes les petites interactions que l’on peut faire… Et c’est au premier abord assez surprenant ! Un jeu Silent Hill qui se joue en partie en première personne ! Car en effet, on sera amené à revenir dans cet appartement de très nombreuses fois au cours du jeu.
En fait le jeu se déroule de cette manière : depuis l’appartement, où on est en première personne et où le gameplay se résume à se déplacer dans un 20m2 et à interagir avec des trucs, on peut accéder à des niveaux de Silent Hill plus « basiques », de part le fameux trou dans la salle de bains donc. Dans ces niveaux on ne trouve aucun point de sauvegarde, qui sont remplacés par des trous ramenant à la chambre 302. L’appartement agit donc comme la « safe room » du jeu : on peut y sauvegarder, déplacer les objets de son inventaire (dans ce jeu, limité à 10 emplacements) vers son coffre à la Resident Evil. Et c’est à peu près sa seule fonction en termes de gameplay. Mais c’est en termes de narration que cet appartement va se révéler tout simplement l’élément du jeu qui m’a le plus transcendé.


Je l’ai sous-entendu brièvement dans la précédente partie, mais l’intérieur de cette chambre évolue. On peut interagir avec plein de trucs, et on sera toujours récompensé d’une manière différente. Les interactions évoluent en effet au fil de la partie. Parfois ce sont des simples évènements random : le proprio qui toque à la maison et essaie d’ouvrir la porte sans succès ou qui se dispute avec un résident, la voisine qui se bat avec des mouches dans le couloir en regardant dans le judas… les voisins d’en face qui mènent leur petite vie comme on peut le voir depuis la fenêtre menant sur une ville à l’esthétique dépressive et mélancolique que j’aime de tout mon coeur… Eileen qui se maquille ou regarde le mur dans sa chambre… Des évènements randoms qui donnent déjà de l’identité à cette chambre, et qui font nous y attacher.



Mais d’autres fois, ce sont des évènements profondément bizarres, des anomalies qui donnent la chair de poule : des mains ensanglantées qui apparaissent dans le mur en face du judas, une tête qui vole au loin dans la rue, la télé qui grésille sans raison, Henry qui fait des commentaires bizarres sur les éléments de décor de sa maison… et tout ca viendra être sublimé dans la deuxième partie du jeu, où l’appartement deviendra de plus en plus inhospitalier et hanté de part en part, faisant exploser l’oppressante claustrophobie à des niveaux inimaginables. Tous ces éléments ont du sens, et mêlés aux notes glissées sous la porte et autres transmission radio et évènements dans la rue visibles depuis la fenêtre, font avancer et révèlent des éléments sur l’intrigue. Tout ça participe à la plus grande réussite du jeu : la personnification de la chambre.




La chambre est véritablement l’élément central du jeu, un autre personnage principal au même titre qu’Henry et Walter. On en vient à la connaître par cœur, remarquer directement le moindre micro-changement dans son architecture qui viendra nous faire poser 10 000 questions. Revenir dans la chambre après chaque expédition dans un niveau, c’est toujours un sentiment grisant : on a toujours hâte de découvrir ce que fait le monde extérieur, quels changements se sont opérés en notre absence, quelles nouvelles horreurs nous attendent… C’est complètement fou comme narration. Mais alors quand le jeu va venir proposer des énigmes liant la chambre et les niveaux, et venir faire des trucs de zinzin dans le dernier acte du jeu… je ne peux qu’être ébahi devant un tel concept mené d’une main de maître du début à la fin. Cette chambre m’a hanté pendant des jours, et je pense qu’elle sera toujours dans un petit coin de ma tête, à jamais… comme un espèce d’endroit réconfortant, mais dangereux si mes divagations internes m’y abandonnent trop longtemps…
Dans le trou

Quittons la chambre 302 (enfin « quitter », tout est relatif), pour nous aventurer dans les niveaux inhospitaliers, dérangeants et mystérieux de Silent Hill 4. Commençons par ça : il y a 6 environnements différents dans le jeu, 2 d’entre eux sont supers, et 3 d’entre eux sont merveilleux. Aussi bien thématiquement que visuellement ou encore dans leur level design et les énigmes qui sont proposées.
Je pense particulièrement à la Prison sous-marine et son architecture qui retourne le cerveau sous fond d’histoire terriblement malsaine, l’Hôpital très différent de celui de la ville de Silent Hill, plus « hanté » et « liminal » et bourré de salles à la symbolique forte et terrifiante, et surtout le merveilleux niveau des Appartements, véritable chef d’œuvre de narration environnementale. Sérieux, découvrir la vie de tous les résidents, leurs relations, leurs problèmes et leurs dérives malsaines… un très grand moment du jeu vidéo d’horreur.
Je ne comprends par contre pas pourquoi le jeu s’ouvre sur le métro, vraie purge rappelant les pires moments de son grand frère.



Y’a plusieurs choses qui frappent en découvrant le jeu pour la première fois. Des choses qui tranchent radicalement avec les standards de la série.
D’abord c’est lumineux ! Terriblement lumineux ! En sortant d’un Silent Hill 3 pendant lequel 80% du jeu est plongé dans un noir presque total avec quelques reflets de rouge, ca fait bizarre. Tellement lumineux que le jeu se sépare d’une des mécaniques légendaires de la série : la lampe torche. Et à vrai dire c’est pas une grande perte. J’ai toujours trouvé l’idée sympathique sur le papier mais pas super bien exécutée. En tout cas ce n’est pas parce que c’est lumineux que c’est moins flippant ! Tout se joue dans l’ambiance, dans les teintes : c’est parfois très vert, très gris, très rouge, tout dépend des niveaux mais ca apporte un sacré sentiment d’étrangeté et de profonde solitude bien plus subtil que dans les précédents jeux.
On ajoute à ça de nombreuses superbes idées sur le grain même de l’écran, dont des glitchs visuels et des moments où toutes les couleurs saturent, ainsi que des angles de caméra monumentaux et plein de sens qui sont à mon humble avis les meilleurs de la série… et ouais, le jeu dégage un sacré truc. Et ce malgré le fait qu’il est purement techniquement inférieur à Silent Hill 3.



Ensuite, rejoignant la lampe torche dans la liste des mécaniques légendaires passées à la trappe… adieu la radio ! Elément de gameplay brillant des deux premiers jeux, justifié scénaristiquement et nous foutant dans un état de stress pas possible quand ça commence à grésiller, témoignant qu’un ennemi se trouve pas loin… c’était devenu une gimmick insupportable dans le 3, moins pertinente et qui ne servait qu’à nous péter les oreilles H24 tandis qu’on fuit dans le noir complet les nombreux chiens-tampons ou hommes-règles qui nous coursent. C’était devenu une sorte de boulet que se traînait la série, qui n’aurait pas fait beaucoup de sens dans le design et même la narration de Silent Hill 4, alors son absence ne se fait pas regretter du tout.
Autre changement, cette fois-ci du côté des énigmes. L’absence d’un sélecteur de niveau de difficulté lié à ces dernières au lancement du jeu préfigure la direction prise par les énigmes : exit les puzzles à l’échelle d’une salle basés sur les textes à déchiffrer et des trucs à placer correctement ou activer dans un certain ordre, ici on se retrouve avec des énigmes environnementales.
Des trucs du genre modifier l’architecture d’un bâtiment, se trimballer une torche dans le niveau pour éclairer des zones, des interactions avec la chambre 302 comme je l’ai brièvement évoqué… Et c’est un vrai vent de fraîcheur bienvenu ! Ca se marie parfaitement bien avec un level design lui aussi différent d’à l’accoutumée. Il est en fait plus « classique », plus « Residentevilesque ». Le truc qui témoigne le plus de ça c’est que désormais, quasiment l’entièreté des portes sont ouvrables, et toutes les zones jouables ! Ca change des couloirs entiers à spammer X sur des dizaines de portes pour n’en voir qu’une seule être ouverte. Je n’ai pas vraiment d’avis sur ce level design, d’un côté c’est moins original, « outsider », mais de l’autre ça fait du bien après 3 jeux qui utilisaient les mêmes gimmicks. Dans l’état c’est plutôt agréable et les niveaux sont très cools à parcourir. Les ennemis sont intelligemment placés : y’en a pas trop ni pas assez, à la manière de Silent Hill 2.


Enfin, le dernier changement notable se trouve dans la gestion de l’inventaire. Adieu l’inventaire illimité qui mets en pause le jeu, bienvenue aux 10 places d’inventaire dynamique dans lequel on peut bouger à tout moment avec les flèches directionnelles !
C’est un choix sacrément osé et qui en a frustré plus d’un pour des raisons légitimes, mais c’est un choix que je vais défendre.



Et ce en me basant sur ce côté « dynamique ». J’ai toujours trouvé ridicule de pouvoir cancel l’animation de rechargement en le faisant depuis le menu, tout comme le fait de pouvoir se soigner à tout moment en mettant sur pause. Ca casse l’immersion et rend les choses trop faciles. Heureusement que c’était pas le cas dans un jeu comme SH3, mais dans SH2 ca faisait un peu pitié. Et SH4 est un jeu comme SH2. Alors je trouve ca pertinent ! Maintenant on doit réfléchir à quand est-ce qu’on doit recharger pour pas se prendre un méchant coup mal placé, et pas se contenter de mettre pause pour se soigner oklm. Et je trouve cet inventaire plutôt élégant et ergonomique ! On sait constamment ce qu’on a sur nous, sans casser l’action du jeu, c’est facile et rapide de changer d’arme, de se soigner ou d’utiliser un objet clé simplement en le sélectionnant et en appuyant sur carré… On gagne vraiment en quality of life. Et ça n’était possible qu’en limitant l’inventaire. Lors de la première moitié du jeu, ça ne pose véritablement jamais de problème, et l’aspect gestion de son inventaire, choix de ce qu’on emmène depuis sa chambre… fonctionne, et est plutôt stimulant ! Là où ca va être un peu chiant c’est dans la seconde moitié où, de part certains choix de design, les objets s’entassent, et où les nombreux allers-retours deviennent obligatoires, et à vrai dire un peu pénibles. Le jeu reste plutôt gentil sur le nombre d’endroits où on peut revenir à la chambre ceci dit. Le seul moment où ça m’a vraiment fait péter un plomb c’était lors du dernier niveau, mais je ne peux expliquer pourquoi sans spoiler. Ainsi, je peux donc le dire, je suis content de cette évolution de l’inventaire !
Les combats restent peu ou prou la même chose, mais la formule a été un peu améliorée, rendant le tout plus agréable. Déjà, le jeu mets une grosse emphase sur les armes de corps à corps : il n’y a que deux armes à feu, un petit gun et un magnum… contre de nombreuses armes de corps à corps différentes.
Parmi ces dernières, des plus puissantes que d’autres, certaines qui se cassent au bout d’un moment… et surtout, on peut charger un gros coup, qui offre des frames d’invincibilité en plus de faire de très gros dégâts. Y’a carrément moyen d’en abuser ahah. Tout ça s’accorde bien avec l’inventaire limité : c’est intéressant de gérer ses armes de corps à corps, trouver celles qui nous conviennent le mieux, garder quelques armes cassables mais puissantes sous le coude pour s’en servir au lieu de gaspiller des balles, ce genre de choses… et s’il y avait 400 armes à distance, un tel inventaire aurait vite posé ses limites. Là on a un flingue faible mais avec beaucoup de balles, un flingue fort avec peu de balles, et ça suffit amplement. Ce suréquipement et cette surpuissance des armes au corps à corps, mêlé avec le faible nombre d’ennemis et leur vie limitée, incite bien plus au combat que dans les jeux précédents. On peut toujours fuir, mais on hésitera beaucoup moins qu’avant à laver une salle importante dans laquelle on pense qu’on sera amenés à revenir. Et c’est cool !



Le bestiaire en lui-même est extrêmement varié, et ce plus que jamais dans la série. Tous les ennemis ont leur propres patterns, parfois hyper originaux. Ils sont visuellement moins inspirés que ceux des précédents jeux pour la plupart, mais il y a de vraies réussites. Je pense notamment aux Doublehead, aux Patients (absolument TERRIFIANTS) et surtout… aux fantômes.
Les fantômes sont une autre des mécaniques décriées du jeu : représentant les victimes de Walter Sullivan, ce sont des ennemis ayant chacun leur propre personnalité, manière de se déplacer et d’attaquer, tous visuellement hyper stylés. Là où ça pose problème, c’est que ces ennemis sont rapides, invincibles, et font des dégâts sans même nous toucher, ayant une sorte de rayon d’action. Dit comme ça ça a l’air d’être un cauchemar, mais rassurez-vous ces derniers sont peu nombreux, limités à certaines salles, les dégâts qu’ils nous font sont plutôt faibles et y’a des moyens de s’en débarrasser temporairement ou de limiter leur effet. Ces moyens ne sont d’ailleurs pas toujours très bien communiqués et un peu obscurs, mais ils existent, et dans tous les cas la fuite reste une option viable.


Autre point intéressant du jeu : il ne contient quasi pas de boss ! Il faudra attendre la toute fin du jeu pour en voir seulement 2. Ca découle sans aucun doute du manque de personnel et de temps, mais à vrai dire c’est pas plus mal, la série n’a jamais brillé dans son boss design et j’ai toujours vu ça comme une case à cocher (cochée un peu mal) plus qu’autre chose. Les deux boss en question ne sont pas révolutionnaires ni incroyablement stimulants, mais sont basés sur des énigmes un peu sympas. Leur caractère rare joue en tout cas en leur faveur, et ne représentent pas une corvée. C’est déjà ça.

Vous l’avez compris, j’ai été plutôt élogieux avec le gameplay de Silent Hill 4 malgré tout le mal qu’on en dit habituellement. Je trouve les choix osés certes, parfois pas toujours superbement exécutés, mais toujours pertinents et dans tous les cas jamais véritablement dérangeants. Enfin, ça c’était valable pendant la première moitié du jeu en tout cas… Car en effet, arrivé à la seconde, le jeu va bouleverser absolument toutes les règles qu’il a définies depuis le début. Et c’est ça, précisément ça, qui fait que Silent Hill 4 est tant décrié. Parce que c’est radical. Je vais en parler très brièvement dans la prochaine partie, que je vous invite à skip si vous n’avez pas fait le jeu. Ca reste de l’ordre du spoil mineur, mais découvrir ça en jouant au jeu c’est une sacrée expérience.
La crise de la quarantaine
Bon, alors, qu’est-ce qu’il se passe arrivé à la seconde moitié du jeu ? Trois choses.


Déjà, et celle qui a fait couler le plus d’encre : le jeu devient une escort mission. En effet, la seconde moitié du jeu correspond au moment où l’on retrouve Eileen, que l’on doit donc se coltiner pendant les niveaux. Son IA est débile (le pathfinding est terrible), et il faut biiien attendre qu’elle soit collée à la porte pour pouvoir la passer et qu’elle nous suive dans la prochaine salle. Quand j’ai découvert ça, j’ai été pris de désespoir, me demandant comment j’arriverais à finir le jeu. Je m’imaginais déjà devoir tuer tous les ennemis à chaque fois ou pire, les esquiver tant bien que mal en attendant qu’Eileen arrive devant la porte en espérant qu’elle se fasse pas posséder 20 fois avant de me rejoindre. Mais passé ce désespoir initial… quand on capte qu’on a juste besoin d’elle pour atteindre la porte de sortie du niveau, que ces derniers sont souvent structurés autour d’un hub, limitant les allers retours et les déplacements longs, et qu’on peut donc juste la laisser à un point stratégique pour venir la chercher à la fin et seulement se taper 10 minutes grand max d’escort mission… bah, ca va.
Ensuite, et ça c’était aussi un gros coup au moral : la chambre 302 n’est plus l’endroit safe qu’elle était. Elle sera en effet victime de nombreuses hantises liées à des objets précis de la maison, qu’il faudra faire disparaître en plaçant des bougies aux bons endroits sous peine de perdre de la vie en passant à côté, et donc en ne pouvant plus faire certaines actions sans danger ou même nous balader dans cet endroit que l’on considérait comme notre petit chez-nous réconfortant, aussi bizarre soit-il ! Qui plus est, la chambre ne nous soigne plus ! Heureusement, si on a bien géré ses soins jusqu’à maintenant en utilisant au max les facultés régénératives de la chambre, mixé avec le fait qu’il y a désormais biiien plus d’objets de soins dans les niveaux… bah, ca va. Une fois de plus. Et surtout, ça sert la narration de OUF ! Voir la chambre dépérir à un tel point, ca fait quelque chose. C’est terriblement angoissant.




Et enfin, la seconde moitié ne consistera qu’en une revisite des mêmes niveaux. C’est certes pas très inspiré, je suis d’accord, mais chaque niveau proposera une nouvelle énigme centrale, toujours liée au fait de réussir à amener Eileen à la fin du niveau de manière détournée (du genre ouvrir un passage alternatif pour qu’elle puisse passer, car inapte à prendre les échelles). Ces énigmes sont très cools, intimement liées au personnage principal de la zone en question, et c’est globalement très agréable de redécouvrir ces niveaux de cette manière. Du coup… bah, ca va. C’est encore et toujours utile pour la narration, qui consiste dès lors en une grosse fuite en avant en plongeant toujours plus dans la psyché dérangée de Walter, superbement représentée par ces escaliers tournant séparant chaque niveau. Plus rien n’a de sens architecturalement, on passe d’un niveau à l’autre de manière surréaliste, et j’adore cette montée en puissance vers le cauchemar, la fin du jeu.
Alors oui, cette seconde partie fait des choix osés, mais encore une fois… je les défends tous ! J’ai au début perdu espoir totalement, surtout au commencement du niveau de la forêt où j’ai bien cru qu’on devrait se taper un Nemesis constamment jusqu’à la fin du jeu. Mais dans les faits, tout est surmontable. Tout sert superbement la narration. Alors oui, je ne dis pas que j’aurais pas préféré avoir des niveaux classiques jusqu’à la fin du jeu, les escort mission aussi bien amené que ce soit ca reste une gimmick chiante du jeu vidéo. Mais sincèrement, c’est pas si horrible, et je souligne ces choix audacieux. C’est ce qui donne son âme si spéciale au jeu, après tout.
Cauchemardesque habillage
Je ne vais pas revenir longuement sur la DA, car j’en ai parlé de manière plus ou moins décousue au cours de cette analyse. Les environnements sont plus lumineux mais malsains au possible, les charadesigns sont réussis dans leur côté lambda pour les protagonistes et terrifiant pour Walter, les designs des monstres, plus japonais, sont excellents…
Mais j’ai évité un aspect : le sound design ! On est en terrain connu : des sons d’ambiance glauques, des bruits de monstres qui n’existent même pas… mais le résultat global est assez différent des précédents jeux. C’est plus « expérimental », et plus direct aussi par moments. Mais c’est en tout cas très réussi, et participe toujours autant à l’ambiance globale du jeu. Et ce malgré les quelques sons stock footage un peu bizarres désormais cultes, sans doute témoins du manque de temps (à moins que ce soit une volonté artistique…), que je n’ai, croyez moi ou non, même pas remarqués lors de ma découverte ahaha. Il a fallu qu’un pote me dise « t’as pas fait gaffe les chiens ils font des bruits de guépard?? » pour que je le remarque après coup. Donc ca va, j’imagine ?
Quant à la musique, je trouve que moins d’identité se dégage du jeu par rapport à ses deux aînés. Y’a tout de même de superbes compositions tout du long, et l’ajout d’une voix féminine pour nombre d’entre elles (et même masculine pour une en particulier) apporte un sacré truc ! Toutes celles contenant ces voix sont absolument mémorables.
Ah et… c’est quoi ce putain de key art pour l’OST?? Il est MAGNIFIQUE !!

Chant du cygne
Qu’on résume :
Un concept initial mystérieux et engageant, nous poussant à aller jusqu’au bout de l’histoire pour avoir nos réponses. Des symbolismes mentaux déroutants, grâce à des monstres aux designs réussis et des environnements instaurant constamment un sentiment de malaise palpable. Un protagoniste effacé et un peu déconnecté, ici plus que jamais pour permettre à un antagoniste principal merveilleux de briller. Un lieu étrange personnifié et devenu culte : ici pas la ville, mais l’appartement. Un sound design et des OST accompagnant à merveille notre exploration torturée de ces lieux malsains. Des personnages bizarres. Des dizaines d’idées horrifiques brillamment dérangeantes. Une esthétique liminale qui instaure une réelle gêne. Un scénario nous faisant poser des questions constamment pour réussir à comprendre ce qui se passe. Des vrais moments cultes qui ne sortiront jamais de notre mémoire. Des niveaux à la narration environnementale incroyable. Un gameplay imparfait mais contenant de vraies réussites, et rien de vraiment frustrant.



Silent Hill 4 : The Room a absolument TOUT d’un grand Silent Hill. Il a compris l’esprit Silent Hill, alors même qu’on ne met JAMAIS directement les pieds dans la ville. Et j’espère avoir réussi à le prouver, en défendant la plupart de ses idées osées. Des idées que je ne défends pas aveuglément. C’est un jeu imparfait, qui pour plusieurs raisons peut parfois être ultra frustrant si on ose y aller sans savestate. Et c’est jamais un bon point. Mais c’est loin, TRES loin d’être une purge insurmontable dans son gameplay comme beaucoup le disent. Pour voir la purge insurmontable, ce n’est pas vers ce Silent Hill qu’il faut se diriger *clin d’oeil*. SH4 apporte même de bonnes idées de gameplay et de design.
Sur toutes ces bases fortes, Silent Hill 4 vient greffer quelque chose d’incroyable : son identité.
Incroyable, parce que l’identité de Silent Hill 4, bon sang qu’elle est merveilleuse. Bon sang que tous ces concepts fantastiques resteront gravés dans ma mémoire à tout jamais. Tout comme ma découverte du jeu. La découverte de la chambre, les retours dans cette dernière pour voir ce qui a changé et observer la rue, la découverte de la forêt, de la prison, des appartements. Mon désespoir à la seconde moitié du jeu, puis le moment où je me suis rendu compte qu’en fait, c’est surmontable. Mon exaltation sans bornes lors du dernier acte du jeu… Bon sang quelle expérience.

Silent Hill 4 est le Silent Hill avec l’esthétique qui me parle le plus. L’idée de la chambre, d’y être enfermé de l’intérieur à jamais, de découvrir un immense trou menant à des véritables cauchemars ambulants… des cauchemars subtiles, emplis d’un malaise indescriptible silencieux… L’idée de Walter Sullivan. Walter Sullivan, bordel. Et enfin, toute l’imagerie… la tête géante, les chaînes sur la porte, les Patients, le cordon ombilical… tant de choses qui me hanteront à jamais.



Je pense toujours que Silent Hill 2 est le meilleur jeu de la Team Silent. Inattaquable de A à Z sur son scénario, et peu attaquable sur son gameplay. En tout cas inégalable quant à la claque qu’il met une fois terminé.
Mais Silent Hill 4 est putain de brillant. Et au même titre que son ancêtre de deux générations plus tôt, je le considère comme un chef d’œuvre du jeu d’horreur. Un chef d’œuvre qui a inspiré plus d’une décennie plus tard le parti trop tôt Silent Hills d’Hideo Kojima. Une fin tragique pour cet ultime chant du cygne de la Team Silent, mais qui laisse une note d’espoir importante : les personnes les plus créatives et talentueuses de ce monde n’ont pas oublié Silent Hill 4.

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Je comprends totalement votre engouement pour Silent Hill ! Ces jeux sont vraiment originaux et les décors sont simplement effrayants !
Je n’ai malheureusement pas eu l’occasion de tester le 4e, mais quelle description vous en faites ! Je dois mettre la main dessus !!